Le Samaïn Fest (été 2020)
Le Samain raconte une histoire pas si lointaine… Celle d’une fête Celtique qui annonçait l’arrivée de l’hiver dans des pays comme l’Irlande ou l’Écosse. Celle d’une nuit qui permettait aux vivants de retrouver leurs morts autour du feu de l’Anaon en Bretagne. Samain, Heven ou Kala Goañv… la période du 1er novembre était célébrée de cette façon dans le Finistère jusque dans le milieu du 20ème siècle. Un calendrier peu connu aujourd’hui mais qui ne s’est pas perdu pour tout le monde…
En 2011, des passionnés de musique décident de réinterpréter cette fête d’antan. Pendant un long week-end (du jeudi au samedi), ils font le pari de faire le lien entre langue, culture Bretonne… et Rock’n Roll. L’objectif ? Créer un festival pour soutenir l’école Diwan de Guipel (basée à la Méziére à cette époque). D’accord… mais avant d’aller plus loin, qu’est-ce que signifie Diwan ? « Ça veut dire La Pousse » explique Charles Castrec, l’un des organisateurs. « C’est une école laïque, gratuite et ouverte à tous, dès l’âge de deux ans. Elle pratique la pédagogie par immersion en langue Bretonne. L’État paie les salaires des enseignants contractualisés, les non-contractualisés sont pris en charge par Diwan Breizh (la Fédération des écoles). À la charge des écoles comme celle de Guipel reste le loyer, les charges et les salaires des employés non enseignants, le tout acquitté par les forfaits scolaires et les dons des particuliers et des entreprises. Nos enfants y allaient et on était beaucoup de parents à écouter du Metal. On s’est dit pourquoi pas faire des concerts ? » Presque dix ans plus tard, l’aventure continue et le concept rassemble près de 500 personnes par jour. Pour Mick, l’un des fondateurs, tout ne s’est pas fait par hasard… Mettre les pieds dans les coulisses d’une telle organisation n’est pas une première : « j’ai longtemps préparé la bouffe en festival pour les groupes et le public. Je suis allé un peu partout ! Au Samaïn, j’ai fait un peu de tout aussi… les commandes, le merch, les goodies, les flyers… mais je m’occupe principalement de la restauration. J’ai aussi mon mot à dire sur la prog. »
La programmation, c’est le domaine de Charles, qui avant de parler de son travail, n’hésite pas à mettre en avant l’implication des autres : « on a eu de l’aide dès le début. Tom des Chouch’n Molotov’ qui n’a pas hésité à prêter son matos. Théo qui a fait la sono. Brieg qui est venu avec Les Ramoneurs de Menhirs qui ont joué gratuitement. » Et côté artistes, il y eu de belles affiches ? Pas de doute ! Parmi ceux qui sont passés sur la scène de la Mézière, on retiendra quelques pointures comme Regarde les Hommes Tomber, Les Ramoneurs ou encore Loudblast : « oui, mais ce n’est pas forcément représentatif. On cherche surtout des groupes bien lancés et qui n’ont pas encore explosés », fait remarquer Charles. Pour des raisons financières (hébergement, frais kilométriques…), la majorité des formations invitées sont Françaises mais il y a eu des exceptions telle que Bölzer. « Un très bon souvenir ! Ce sont des mecs gentils. Ils sont Suisses mais l’oncle d’un des musiciens habite à la Mézière, ça a pas mal facilité les choses. » Vous l’avez compris, le Samaïn, c’est l’occasion de découvrir des artistes prometteurs… mais aussi d’écouter des groupes qui chantent en Breton (Ebel Elektrik, Anken, Mörkvlth, Belenos…). Et puis, après dix ans d’organisation, les anecdotes ne manquent pas comme ces soirs de 2011 et 2013 où Morkelvyz (dans lequel officient Charles et Mick) accepte de monter sur scène : « ah oui mais on ne le refera pas ! C’est trop compliqué de jouer et d’organiser. » Il y a aussi ce jour où le groupe Kickstarters (qui devait seulement jouer sur la terrasse d’un café) s’est vu monter sur la grosse scène du Samaïn : un désistement de dernière minute qui a fait des heureux !
Au Samaïn, il y a des concerts de Metal mais c’est loin d’être tout. Depuis quelques années, des groupes aux influences diverses, sont invités à jouer dans les cafés de la Mézière. Une programmation en journée et un partenariat local qui se consolide avec le temps. En plus de la musique, d’autres animations sont également proposées au public : des causeries en Breton, une cérémonie druidique avec La Gorsedd (assemblée officielle des Druides de Bretagne) qui est suivie d’une conférence… La décoration de la salle revêt aussi une importance toute particulière. Chaque année, elle est réalisée pour mettre en lumière des artistes telles que Wyllö Droükspered ou l’association Truc (recyclerie d’art de la Mézière). Mais avec tous ces événements au sein d’un même week-end, comment se gère la communication ? Ça, c’est le domaine de Mathias : « pour les visuels, on bosse avec un graphiste de grand talent : Xavier. C’est une bête de détails. Pour te donner une idée, les affiches des trois dernières années ont été pensées en triptyque. Moi, je fais surtout de la diffusion sur Facebook et Instagramm. La difficulté, c’est de réussir à proposer du contenu toute l’année. Avant le festival, je parle du local. Toute la communication du festival se fait en trilingue (Français, Breton et Anglais).» Charles intervient : « on peut aussi citer Erwan Largy. Il a fait les six premières affiches complètement bénévolement. »
Les bénévoles justement, il y en a… Les parents d’élèves mais aussi des gens qui prêtent main forte comme Yoann (équipe prog et responsable de la billetterie) ou Erwann Maudez : « je suis arrivé en 2015. Ce que je fais concerne plutôt le côté régie-plateau. Le backline. Je m’occupe de l’accueil des groupes, du lien entre les musiciens et les techniciens. » Et le boulot ne manque pas ! Côté logistique, de nombreux partenaires prennent part à cet événement : « c’est Eurolive qui sonorise. On ne se voit pas faire sans eux. La bière vient du Finistère, elle est brassée par Vincent Couille de Loup, un mec en or ! » précise Charles. « Et Bob, c’est une légende en Bretagne ! », s’exclame Erwann.
À part une subvention de la ville (82 €) et un prix réduit pour la location de la salle Cassiopée, le Samaïn Fest est complètement indépendant. Depuis 2011, l’équipe donne de son temps pour mettre en avant une musique qu’ils aiment au service de la sauvegarde d’une langue régionale. Après dix ans, on peut dire que le pari est réussi : « oui, le but est de financer l’école Diwan de Guipel et le pire chiffre qu’on ait fait est zéro. On est jamais descendu en dessous. Les groupes sont toujours payés mais les musiciens font souvent pas mal d’efforts » explique Mick.
Avec le virus du Covid, pas de Samaïn en 2020… mais ce n’est que partie remise ! Le rendez-vous est donné les 21-22 et 23 octobre 2021 ! Et qui sait, il y aura peut-être des nouveautés dans les années à venir ? Charles regarde Mick puis se marre : « nos enfants se sont mis à la musique et ils sont motivés pour jouer. Alors oui, ils monteront peut-être à leur tout sur la scène du Samaïn. »
Caroline Vannier
*Termes Bretons recueillis auprès de l’équipe du Samaïn Fest
Sur le Web :
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