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Des histoires qui se vivent

Charly’s Angels (hiver 2022)

Charly’s Angels (hiver 2022)

« Moi, j’avais jamais chanté. Samira n’avait jamais joué (batteuse d’origine). Nath à peine. C’était Isa la musicienne (groupe Tulaviok). On nous a dit que c’était super bien donc on a continué », explique Chrys. L’histoire de Charly’s Angels démarre comme une évidence. Un groupe formé pour une soirée hommage aux Ramones à la Fun House et le truc qui se produit, là, sur scène devant le public. Cette formation tribute n’a pas de nom, les musiciennes sont quasi débutantes… et pourtant leur presta crève déjà les planches ! Un souvenir qui revient comme un déclic pour certains : « C’est marrant. Je crois que j’y étais aussi en tant que spectateur », intervient Cyrille Chevalier (batteur actuel qui succède à Samira en 2008). Vingt-trois ans plus tard, Charly’s Angels est toujours là. La moitié des membres d’origine a changé mais l’essence reste la même. Après toutes ces années, le groupe continue à distiller ce son punk-rock piqué à vif qui sied si bien au live. Une musique qui aurait pu s’échapper des studios d’un Glasgow ou d’un London City… Allons bon, qui sait ? Ce chemin-là, ils l’emprunteront peut-être un jour… mais pour l’heure, c’est en Bretagne que ça se passe.

À Rennes, rares sont ceux qui n’ont jamais vu une affiche des Charly’s sur les murs des caf’ conc’ et des salles de concerts. Vingt-trois ans, c’est un sacré parcours pour un groupe ! Une passion pour la musique qu’ils vivent ensemble mais qu’ils ont du mal à expliquer. Pour mettre des mots sur une telle longévité, il faut forcément passer en revue la mémoire commune du groupe. Des noms fusent… Zaza, Samira et Xoff qui a pris la guitare au même moment que Jeff : « Oui, je suis arrivé en même temps que Christophe en 2002. Au départ, on a repris les titres faits par les filles et au fur et à mesure, j’ai composé de nouveaux morceaux. » Chrystèle Gérard (chant) et Nathalie Toulgoat-Fabre (basse) qui sont les membres fondatrices évoquent les souvenirs des débuts. Passée la minute de réflexion, elles commencent par l’année 2000 : « le premier enregistrement ! C’est Bruno qui s’en est occupé (Mondo Bizarro, groupes Gunners, Trotskids…). On a fait un ou deux morceaux à la Fun et une partie chez Nath. Oui, c’était chez moi, enchaîne l’intéressée. On avait tout monté par la fenêtre et par l’échelle de meunier. Un vrai studio sauvage ». De cette expérience naît S/T, un EP autoproduit. Vont suivre SPLIT SP (avec le groupe Happy Kolo en 2001), All I Want (2009) et plus récemment, le vinyle Romance (2019). Pour les visuels, les musiciens font presque tout en mode Do it yourself sauf le logo et les premières pochettes qui ont été réalisés par Dimitri HK (créateur, tatoueur, groupe Happy Kolo…). « On connaissait pas mal de monde dans le milieu et c’est vrai qu’on a eu pas mal d’opportunités pour jouer et enregistrer » précise Chrys. Les concerts, il y en a eu un peu partout : en Bretagne, en région parisienne et dans des squats comme République (dans l’Est). Mais… en plus de vingt ans, le groupe a-t-il connu des interruptions ? « Moi, quand j’étais en cloque, j’ai pas tourné pendant trois ans », précise Nath. « Il y a aussi eu le festival des Bals Sauvages. Nath n’a pas pu y aller. C’est Carole qui l’a remplacée. Elle a appris les morceaux à la dernière minute dans le camion », se rappelle Chrys. Les enfants, le boulot… Le quotidien est là et il est parfois compliqué de tout concilier. Même pour répéter, il faut s’organiser : le groupe se retrouve le plus souvent le dimanche au Jardin Moderne, un jour qui colle à peu près avec le planning de chacun. « Oui, on aurait aimé faire plus de concerts, avoue Nath. C’est vrai que c’est pas toujours simple à gérer… Je bosse souvent le week-end et je ne peux pas quitter mon boulot comme je peux ». Chrys, elle, est professeure de danse et elle a réussi à passer son diplôme sans sacrifier le chant : « Musique, danse et formation. Oui, ça a été des années bien remplies. » Elle s’arrête un moment puis reprend : « La musique, c’est un sacré plus dans notre vie mais ça n’a jamais pris plus de place parce qu’on a privilégié nos familles. » Jeff acquiesce. Cyrille esquisse un sourire : « J’ai amené ma fille une fois en concert avec un casque sur la tête. Elle m’a regardé assise sur son tabouret, près du bar. »

Le live justement… c’est pour ce moment que les musiciens se lancent dans un groupe. Un instant clé qui ne trompe pas. Pas de filtre possible ! Oui, c’est bien devant un public qu’on reconnaît la qualité d’un jeu. Celui des Charly’s Angels est clair : une maîtrise indéniable mais qui n’étouffe jamais l’efficacité des riffs. La voix, les instruments… tout insuffle l’urgence de l’instant. Un son qui se vit en concert et qui parle à un paquet de générations ! Depuis 2009, le groupe figure aussi sur le label Mass Prod : quand on sait que la maison porte le punk depuis vingt-six ans, c’est une sacrée reconnaissance. Oui, de bons musiciens, ils le sont… mais qui étaient-ils avant de toucher à un instrument ? Ils ont tous été clairement influencés par les groupes qu’ils ont découverts à l’adolescence. Pour Cyrille : ACDC, Motörhead, Peter and the Test Tube Babies, Joy Division… Pour Jeff : Rockabilly, Stray Cats, Social Distortion, Meteors, Rancid… Pour Chrys : les Ramones et Motörhead. Pour Nath : Cold wave, Pop rock anglaise, Metallica, Siouxsie, The Cure, Joy Division, U2, ACDC, Motörhead, Depeche Mode… Côté pratique, les Charly’s sont tous autodidactes. Seul Cyrille a repris quelques cours de batterie (depuis 4 ans) pour approcher de nouvelles techniques et se donner une discipline de travail. Mais les années qui précèdent, il les a passées en relevant les manches et en intégrant pas mal de groupes : Green Fish, les Spationautes, TV Men, DeafBrood, 19 Hell… Jeff aussi a joué dans d’autres formations comme Gotham (psycho) de 1999 à 2007 : « J’étais au chant avec un peu de guitare rythmique. On a même fait un concert commun avec les Charly’s Angels ». Nath et Chrys ont débuté avec les Charly’s qu’elles n’ont jamais quittés. Un groupe qu’elles ont créé avec Samira et Isa… et qui poursuit sa route avec classe et simplicité. Deux adjectifs qui pourraient tout aussi bien leur correspondre.

La scène, les répétitions… cette passion pour la musique est restée comme un fil incassable dans un quotidien bien occupé. Boulot, famille… Ils avaient des raisons de ralentir mais ils n’ont rien lâché. Charly’s Angels continue… et continuera à donner de la voix pour bien longtemps. Les vrais passionnés n’arrêtent jamais, c’est bien connu… et ces quatre-là en sont un parfait exemple.

Caroline Vannier

Interview spécial vinyle Romance

1 – Est-ce que l’enregistrement se pense différemment pour une sortie vinyle ?

Il y a beaucoup de groupes qui parlent de projet, de concept. Pour nous, l’envie était de retranscrire un son le plus proche de ce que l’on donne en live, auquel on pourrait associer un beau produit. Quoi de plus beau qu’un vinyle ?
L’idée était arrêtée depuis longtemps sur la pochette et la couleur du vinyle.

2 – Comment avez-vous travaillé pour garder cette énergie Punk-rock ?

Nous avons travaillé avec Mathieu, chaudement recommandé par Guilhem des Sleepwalkers.
Nous avons enregistré dans une ferme à Montauban de Bretagne, c’était calme jusqu’à ce que l’on branche les amplis… Mathieu a vite compris nos envies et le son que l’on souhaitait. Puissant, dynamique, pas trop propre, qui transmette l’énergie que l’on dégage sur scène. Il était à l’écoute et de très bon conseil. Tout était dans la boîte en une semaine pour les instruments, nous avons placé les voix plus tard, afin de jongler avec les emplois du temps de chacun.

3 – Du visuel, au studio, en passant par le pressage… Avez-vous tout maîtrisé de A à Z ?

Tout est Homemade, de la conception de la pochette, 12 titres dont 11 originaux (une seule reprise), la recherche du studio, le choix du pressage, … et même le clip vidéo.
À la fois, deux albums en 20 ans, on peut dire qu’on prend le temps de la réflexion. Un titre par an, donc prochain album en 2029.
Mass Prod nous a soutenus et conseillés. Sans oublier Mathieu pour le master et le mix, une fois l’enregistrement bouclé.
Ce nouveau disque est totalement autoproduit avec un crowd funding. Merci à nos généreux donateurs sans qui nous n’aurions pas pu faire aboutir cet album dont nous sommes fiers.

4 – Choisir le vinyle comme support, était-ce une façon de marquer les 20 ans du groupe ?

C’était surtout un caprice de Jeff qui voulait un vinyle rouge, grand fan de vinyle. On a fait d’une pierre deux coups.

5 – Les 12 titres qui figurent sur les 2 faces sont-ils tous des morceaux récents ?

Le premier album est sorti en 2009. Certains ont été écrits il y a déjà un certain temps, mais c’est surtout à partir de 2016 que la plupart des morceaux ont été finalisés.

6 – Le mot de la fin ?

Longévité pour un groupe dont 3 des membres sont présents depuis 2002. On compte bien continuer, surtout garder notre énergie. Le second album Romance était bien plus sauvage que le premier. Imagine le troisième…
On est tous fiers de cet album que nous n’avons pas beaucoup joué sur scène et pour cause, sortie en avril 2020…

Sur le web :
https://www.facebook.com/thecharlysangels
https://charlysangels.bandcamp.com/album/romance

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