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Des histoires qui se vivent

Sébastien Blanchais, passeur et musicien

Sébastien Blanchais, passeur et musicien

Sébastien Blanchais trace sa route depuis plus de vingt ans. Responsable d’un label, disquaire, organisateur de concerts, musicien… Au fil des ans, il s’est fait passeur d’un style qui ne vieillit pas. Intermédiaire indispensable entre le public et le monde du rock, il a su insuffler un goût d’ailleurs à travers son magasin Rockin Bones et son label Beast Records. Quiconque jettera un œil rue de la Motte Fablet le comprendra : pousser les portes du shop de Seb ouvre l’horizon, à l’image d’un road trip musical. Un voyage immobile qui mène forcément quelque part en Europe, en Australie, aux États-Unis… mais aussi à Rennes avec sa scène locale. Ici ou à l’autre bout du monde… Rock d’hier et d’aujourd’hui, les années passent sans se ressembler… Un adage qui sied sans doute tout autant au genre musical qu’à celui qui le défend.

Le métier de disquaire a connu bien des tourments ces dernières années. Concurrence, Covid, dématérialisation… Face aux plateformes et aux géants du commerce, le magasin de Seb a pourtant tenu bon. Le public favoriserait-il une identité forte plutôt qu’une offre pléthorique ? Toujours est-il que la difficulté ne l’a jamais contraint. Même quand le vinyle a failli disparaître, le disquaire a continué de le vendre, tout comme il le fait aujourd’hui avec le CD et la cassette. Chez lui, tous les supports ont leur place à condition que l’enregistrement soit de qualité. Implanté depuis deux décennies dans une cour intérieure du centre ville, le lieu a du caractère… mais vous l’aurez compris, c’est surtout entre les murs que ça se passe. Le taulier connaît son affaire : il propose une vraie sélection et sait raconter l’histoire de ceux qui façonnent la musique. Rockin’ Bones offre une belle singularité dans le paysage local. Une particularité qui a pris le temps de se construire : « oui, tout s’est fait progressivement. J’ai monté le shop en 1998 avec très peu de choses. Avant de déménager ici, il était situé rue Legraverand (jusqu’en 2000). Depuis qu’on est là, ça s’est franchement agrandi ! On trouve pas mal de labels indépendants. On travaille sur la musique qu’on connaît. C’est devenu une adresse bien connue des musiciens de Rennes. » La façon dont Seb Blanchais exerce son métier est étroitement liée à ses aspirations musicales. Passionné avant tout, il parle à cœur ouvert des artistes qu’il défend. Ceux qui en mots et en musique savent dire le monde. Ceux qui ont su créer un son unique. Des références ? Le monsieur nomme volontiers des musiciens comme Spencer P. Jones, les Stooges, Alice Cooper, les Dead Boys mais aussi les Cramps, le Gun Club ou les Beasts of Bourbon : « des gens qui ont su restaurer des vieux styles. C’est grâce à eux que j’ai découvert les pionniers. » Les vieux styles justement… Rythm and blues, rockabilly, country… le rock est né d’influences multiples qu’il est bon de ne pas oublier. Des genres qui « n’ont pas toujours été populaires » et qui méritent d’être découverts par le public d’aujourd’hui. C’est ce que Seb invite à faire. En bon passeur, il transmet une musique qui a parfois été mal comprise. Mettre en avant, communiquer, véhiculer… il faut croire que du shop au label, il n’y a qu’un pas…

Dans l’imaginaire collectif, Londres est sans doute considérée comme la capitale du rock, de la pop et du punk. Pourtant, d’autres pays ont brillé dans ce domaine et continuent de le faire. L’Australie en est un parfait exemple : « à Melbourne, il doit y avoir 130 clubs. Chaque jour, il y a environ 400 groupes à y jouer. J’ai toujours préféré la musique australienne. En terme de talent, c’est juste incroyable. Tous les labels indépendants ont 6 ou 7 groupes qui viennent de là-bas.» Seb n’a pas seulement créé un label, il a réussi à instaurer « un pont avec l’Australie ». Représentés par Beast Records, ces artistes du bout du monde viennent parfois jouer à Rennes. Il arrive que les groupes d’ici traversent aussi l’océan pour participer aux « festivals Beast, au Tote (l’un des clubs légendaire de Melbourne) ». Aux côtés des musiciens rennais et australiens, on retrouve des formations américaines, allemandes, finlandaises, espagnoles, suisses… Le label ne connaît pas de frontières et c’est, en partie, ce qui fait sa force. Il est aussi le résultat d’un travail d’équipe : « il y a Romain dans le label qui s’occupe de tout l’administratif. Il fait aussi les affiches et pas mal de pochettes : sans lui, rien ne serait possible pour Beast ». Une belle façon de voir la musique mais qui serait incomplète sans les live…

Le label n’existe pas sans les concerts. Seb est disquaire mais pour lui l’enregistrement n’est pas une finalité : « le rock, ça reste un truc physique. Un concert à lui seul peut changer la couleur d’un disque. » Au fil des années, il n’a cessé d’abolir les frontières entre studio et spectacle vivant. Il n’enferme pas le rock : dès qu’il le peut, il le confronte à un public. Avec 250 albums à son actif (2-3 disques par mois / 15-20 par an), le label Beast Records fêtera ses 20 ans en 2023. Une année qui se passera sur scène à Rennes (dans des salles comme la Cité) mais aussi à Binic. Un anniversaire auquel participeront les groupes du label et… qui sait ? Crocodile Boogie aura peut-être l’occasion d’y jouer un ou deux sets ? Et pour cause, Seb y officie en tant que chanteur et même compositeur (il a aussi été frontman chez Head on). Deux formations talentueuses qui, elles aussi, ont su réinventer les classiques. Oui, la musique vue par Seb Blanchais offre décidément des ponts à tous les niveaux ! À travers son groupe, il n’est pas rare qu’il porte des morceaux d’artistes plus ou moins connus : des interprétations de qualité qui donnent encore une fois, du sens au live.

Chaque parcours est unique mais celui de Seb ne laissera personne indifférent. Porté par sa passion pour la musique, il a donné une nouvelle voix au rock : un point de vue et un sens de l’écoute qui fournissent une définition élargie du genre. Par ses initiatives, il a su rassembler des talents d’hier et d’aujourd’hui. Beast Records et Rockin’ Bones continueront d’écrire l’histoire de ce style pendant bien longtemps, c’est certain. Un dernier mot ? Ici et maintenant… le rock n’a peut-être jamais été si vivant.

Caroline Vannier

Sur le web :
https://www.beast-records.com/
http://rockinbones.fr/
https://www.facebook.com/headontheband
https://www.facebook.com/profile.php?id=100044100761333

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